Lucie Lerebourg, laboratoire CETAPS
Chercheuse, laboratoire CETAPS
"Les travaux de recherche sont parfois qualifiés d’inaccessibles ou trop compliqués, je pense que la vulgarisation est un très bon moyen pour remédier à cela."
- Présentez-vous.
Diplômée récemment d’un doctorat en Sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) à l’université de Rouen Normandie, je suis actuellement chercheuse associée au laboratoire Centres d’études des transformations physiques et sportives (CETAPS) et enseignante vacataire à l’UFR STAPS. Mes travaux, réalisés en partie dans le cadre de ma thèse CIFRE (Convention de formation industrielle par la recherche) intitulée « Prédiction de la performance en course à pied : demi-fond et fond » s’inscrivent principalement dans une approche pluridisciplinaire de la performance sportive. J’ai fait le choix de me lancer dans un doctorat pour donner suite à un master professionnel « Ingénierie, Ergonomie de l’Activité Physique » (IEAP) réalisé à l’Université Savoie Mont-Blanc. J’avais à cœur de me spécialiser dans un domaine spécifique scientifique et de poursuivre certaines recherches en parallèle afin de mettre à profit certaines connaissances et compétences acquises durant mon cursus universitaire en STAPS (à Rouen pour les années de Licence et à Chambéry pour les années de Master). J’ai réalisé ma thèse dans le cadre d’une convention de formation industrielle par la recherche (CIFRE). J’étais par conséquent rattachée à une entreprise et j’avais le statut de « doctorante-salariée » (en 35h/semaine). La moitié de mon temps était consacré à mes recherches de thèse, que je faisais principalement dans mon laboratoire de recherche au CETAPS sur le campus de Mont-Saint-Aignan, et l’autre moitié en entreprise chez Orthodynamica à la Clinique Mathilde de Rouen, où j’étais amenée à réaliser des missions annexes sans lien direct avec ma thèse pour aider au développement de l’entreprise. J’étais notamment chef de projet (conception de sandales sur-mesure et personnalisables) dans la cellule R&D. J’avais également pour objectif de maintenir une activité sportive à « haut niveau » et de représenter au mieux les sponsors qui m’accordent encore leur confiance au quotidien (HOKA, Lepape…). Tel était mon double projet pendant ces dernières années !
- Le travail des chercheurs est souvent réputé comme abscons. Pouvez-vous nous expliquer brièvement et sommairement comment vos recherches peuvent impacter notre quotidien ?
En soi, le travail des chercheurs n’est pas si difficile à comprendre, ce sont surtout les sujets ou les thématiques de recherches qui peuvent s’avérer parfois complexes ! Le métier de chercheur est un métier comme les autres. Nous avons des questions, des problématiques, des hypothèses auxquelles on essaye de répondre en nous appuyant sur de la littérature ou des travaux existants et/ou en mettant en place des protocoles expérimentaux, par exemple. Il y a des phases de réflexion, de mise en place d’expérimentations, d’écriture d’articles à visée de publication, de communication (colloques, congrès, séminaires…). À l’heure actuelle, si l’optimisation de la performance sportive peut constituer un enjeu économique majeur, cette dernière engendre également un réel engouement au regard de l’approche des Jeux Olympiques qui se dérouleront sur le territoire français en 2024. L’impact de cette manifestation sportive marquera inévitablement l’histoire où de nombreux athlètes seront à la recherche de records et de performances à l’échelle personnelle, nationale ou internationale. La performance sportive est multifactorielle (facteurs physiologiques, biomécaniques, psychologiques, environnementaux et technologiques) et dépendante de nombreux paramètres qui peuvent être hors de contrôle de l’athlète ou de l’entraîneur tels que les facteurs socioculturels et politiques contribuant à la réalisation de la performance. De ces constats, l’analyse de ces multiples facteurs et la compréhension des circonstances dans lesquelles les performances sportives sont exécutées et évoluent peuvent permettre de mieux cerner la pratique sportive, telle que la course à pied dans le cadre de mes travaux et, ainsi, expliquer l’hétérogénéité des performances athlétiques ou encore de discuter d’éventuelles améliorations chronométriques liées à des influences géopolitiques, culturelles et sociales et une progression économique, par exemple. La volonté de pouvoir aider les athlètes, les entraîneurs ou encore les fédérations afin d’optimiser la performance en identifiant notamment des priorités de développement, indépendamment du niveau et du sexe de l’athlète en donnant la possibilité à chaque pratiquant de pouvoir progresser, était tout l’enjeu de mes travaux de thèse.
- Cet exercice d’appropriation et de simplification de vos travaux de recherches pour le grand public, vous vous y êtes confrontée à l’occasion du concours Ma thèse en 180 secondes. Comment vous êtes-vous retrouvée à participer à ce concours ?
Les travaux de recherches sont parfois qualifiés d’inaccessibles ou trop compliqués, je pense que la vulgarisation est un très bon moyen pour remédier à cela. En période post-thèse, on a inévitablement un peu plus de temps. Je me suis intéressée aux opportunités, relayées principalement par l’Université, qui permettaient de mettre en avant les travaux réalisés. C’est notamment le cas avec le concours Ma Thèse en 180 secondes. Je me suis donc inscrite afin de relever ce nouveau défi, très différent de ceux que j’avais pu entreprendre jusqu’à présent. Je dois admettre qu’au début je me suis demandée pourquoi je m’étais engagée dans ce concours… C’était très déstabilisant… Puis, je me suis prise au jeu et j’ai pris cela comme un véritable challenge, une compétition ! Je n’ai vraiment aucun regret et j’espère aller le plus loin possible !
- Vous avez remporté le prix du Public à l’occasion de la finale régionale Normandie. Quelle est la suite ?
Oui, j’ai décroché ce prix et je ne peux encore que remercier le public d’avoir voté pour moi. J’ai eu un réel soutien et j’ai été très encouragée par l’université de Rouen Normandie, mon laboratoire de recherche, mes proches et surtout les doctorants (la « Roocky Family ») ! L’aventure continue et la prochaine étape, la demi-finale nationale, arrive à grands pas. Rendez-vous à Paris du 7 au 9 avril 2022. Tous les candidats seront amenés à présenter leur speech le 8 avril et l’annonce des résultats aura lieu le lendemain matin. Il faudra de nouveau tenter de convaincre pour espérer passer à l’étape suivante, soit la finale nationale, qui se tiendra à Lyon en juin prochain. Rien n’est joué, rien n’est gagné, mais je tenterai de donner le meilleur de moi-même comme en course à pied !
- Quels conseils aimeriez-vous partager avec un étudiant ou une étudiante qui souhaiterait poursuivre ses études avec la réalisation d’un doctorat ?
Un doctorat, c’est un projet qui ne doit pas être pris à la légère… C’est un projet qui dure au minimum trois ans, où des financements et des collaborations de recherche sont mis en place. C’est un travail d’équipe étant donné que l’on est amené à travailler avec d’autres chercheurs, des enseignants, des professionnels, des participants pour les protocoles et que l’on représente son université, son école doctorale, son laboratoire, son entreprise (dans le cas d’une CIFRE)… Il ne faut pas hésiter à se renseigner auprès des doctorants directement qui seront plus à même de parler de leur quotidien. Chaque thèse est différente, mais le but est commun : acquérir une autre expérience et obtenir un diplôme qui puisse donner accès à de nouvelles opportunités professionnelles (secteur public ou privé). Si l’étudiant est motivé par un projet de recherche et qu’il a un financement, je lui conseille bien évidemment de se lancer !
- Un dernier mot ?
Un grand merci pour cette opportunité de témoignage qui permet de mettre inévitablement en lumière la recherche ainsi que les différents acteurs essentiels à la réalisation d’un tel projet : la thèse.