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Rencontre avec deux enseignants de l'Université

Brice Guignard & Salim Belmessaoud, responsables du DU analyse vidéo et de la performance sportive

Maître de conférence à l'UFR STAPS et analyste vidéo du PSG handball

"La thématique en elle-même n'est pas unique en France. Par contre, on va pouvoir parler du caractère unique sur le mode de fonctionnement. Nous avons des cours qui sont à distance, qui représentent une part non négligeable de l'ensemble des heures de formation."

  • Présentez-vous ! Quel est votre rôle au sein de l’université de Rouen Normandie ?

Brice Guignard : Je m’appelle Brice Guignard et je suis co-responsable avec Salim Belmessaoud du DU (diplôme universitaire) analyse vidéo et de la performance sportive de l’UFR STAPS à l’université de Rouen Normandie. Je suis moi-même maître de conférences depuis 2018. J’effectue mes recherches dans les disciplines de la biomécanique et du contrôle appliquée à la motricité sportive.

Salim Belmessaoud : Je suis Salim Belmessaoud, professeur associé universitaire (PAU) au sein de l’URN et je suis aussi l’analyste vidéo du Paris Saint-Germain handball. J’interviens auprès des étudiants en master au niveau de l’analyse de compétition. Et comme Brice, je travaille sur le DU analyse vidéo et de la performance sportive.

 

  • Ce DU, en quoi consiste-t-il ?

BG : Le DU cherche à compléter la formation de certains étudiants. J’utilise le terme étudiant, mais en réalité ce sont principalement des personnes qui sont déjà insérées dans le monde professionnel et qui veulent se spécialiser sur la thématique de l’analyse vidéo sportive. Ils viennent chercher une reconnaissance universitaire à travers l’obtention d’un diplôme qui leur permet de valoriser leurs connaissances sur des logiciels spécifiques d’analyse vidéo. Par ailleurs, la particularité de ce diplôme universitaire est qu’il est fortement en lien avec le master Entrainement et Optimisation de la Performance Sportive. Il y a une connexion entre les étudiants de master qui ont directement un pied dans le monde professionnel, grâce à l’interaction avec les gens qui viennent du monde professionnel et qui sont dans ce DU.

SB : La genèse est vraiment celle-là. Nous nous sommes rendus compte qu’il y avait une volonté d’ouvrir l’université à d’autres diplômes hors licence ou master. Il y avait une demande du monde professionnel. Comment valoriser un salarié dans le monde professionnel grâce à un diplôme universitaire ? Comment faire pour amener le monde professionnel vers l’université ? L’objectif du diplôme universitaire était de répondre à plusieurs problématiques : celles du terrain, celles des connaissances.

BG : Le recrutement de Salim est lié à la création de ce diplôme universitaire. Lors de son recrutement il y a trois ans en tant que PAU, l’une de ses missions était de créer ce DU.

SR : Au niveau des autres missions, nous sommes vraiment sur des enjeux d’accompagnement autour de l’offre de formation, que ce soit dans l’arrivée à l’Université ou dans la poursuite ou les réajustements qu’il peut y avoir en cours de route.

 

  • En termes de contenu, qu’est qu’on étudie dans ce DU ?

SB : Sur le marché de l’analyse vidéo, il y a des logiciels tel que Dartfish ou SportsCode. Nous, notre objectif numéro un, n’est non pas uniquement de les former à l’outil vidéo, mais également de les amener à s’ouvrir sur l’outil vidéo au sein du monde dans lequel ils se trouvent. Qu’est-ce que la performance sportive ? Comment la mettre en lien avec ces outils vidéo ? Comment s’adapter au milieu professionnel ? Moi je suis issu du milieu professionnel. J’ai un certain regard. Brice, lui, a un regard extraordinaire sur le milieu universitaire. C’est vraiment grâce à ces deux optiques que nous réussissons à répondre à un problème de terrain.

BG : Les objectifs qui sont annoncés par Salim se retrouvent dans les unités d’enseignement (UE) au sein du DU. Dans un premier temps, il va y avoir une connaissance de l’outil : savoir comment utiliser le logiciel, parce qu’on est obligé de passer par ces logiciels au XXIᵉ siècle. Ensuite il y a l’analyse de la performance qui en découle et avoir les outils pour le faire. Mais là ce sont plus des outils de réflexion. Et dans un troisième temps, apprendre à interpréter les données. Voilà comment nous pourrions structurer les trois UE par rapport aux objectifs qui étaient énoncés. En ce sens, le diplôme sollicite plusieurs intervenants, notamment du monde professionnel, pour bien expliquer le fonctionnement réel de ce qui se fait dans ce milieu, avec des exemples très concrets. Ensuite il y a des intervenants qui sont des professeurs d’université, des maîtres de conférences et qui ont cette vision théorique sur les concepts. Cela fait le lien entre la pratique et la théorie.

 

  • Qu’est-ce que cela apporte de travailler avec ce mélange entre monde professionnel et monde universitaire ?

BG : Pour moi c’est très clair, Salim apporte une ouverture sur le monde professionnel, donc un réseau, des contacts mais aussi une maitrise des logiciels. D’un point de vue des contacts professionnels, vu son expérience, c’est parfait. Je crois que vous êtes très peu à faire ce métier en France au niveau du handball.

SB : Je suis le seul, en tant que salarié.

BG : Il est le seul ! Donc Salim, c’est clairement une personne référente. Il y a des personnes qui viennent se greffer autour de ces contacts-là et nous nous en bénéficions. Un exemple concret : cette année, nous sommes allés séquencer un match du Paris Saint-Germain handball. Grâce à Salim, c’est sûr que nous avons un avantage et que nous pouvons bénéficier de son réseau pour amener une dizaine d’étudiants sur place afin de pouvoir faire un travail concret en situation de Live, dans le cadre de leur diplôme.

SB : De mon côté, je suis passé rapidement par l’université quand j’étais plus jeune, mais je connaissais peu ce milieu. Ce que j’en voyais, c’était un décalage quand des étudiants venaient chercher un stage dans ma structure. Je sentais un décalage entre l’enseignement à l’université et ce qu’on attendait de nous dans le milieu professionnel. En rejoignant l’URN, j’ai vite eu un autre regard sur le milieu universitaire. J’y ai compris son organisation mais aussi la complexité dans les échanges. Ce qu’il manque parfois dans le milieu professionnel, ce sont des méthodes de réflexion, c’est du recul sur certaines choses. Dans le monde professionnel, nous sommes tout de suite dans le bain et parfois il faut être amené à prendre un peu de recul. Le DU sert à cela et je pense que ça fonctionne bien. Nous avons quelques étudiants qui sont maintenant dans des clubs professionnels de haut-niveau, à Strasbourg, à Marseille, etc.

 

  • Et ce DU, il est unique en France ?

BG : La thématique en elle-même n’est pas unique en France. Par contre, on va pouvoir parler du caractère unique sur le mode de fonctionnement. Nous avons des cours qui sont à distance, qui représentent une part non négligeable de l’ensemble des heures de formation. Cela nous permet de toucher des gens qui vivent dans toute la France, qui se déplacent peut-être que trois à quatre fois dans l’année pour venir ici, mais sur des semaines massées. Ensuite, nous avons des cours à distance qui s’échelonnent tout au long de l’année. Le succès se mesure sur le nombre de personnes inscrites. L’année dernier, nous en avions quinze. Cette année, nous sommes sur une vingtaine. Mais nous n’avons pas envie non plus de partir sur 50 candidats et c’est justement ce qui en fait peut-être la richesse.

 

  • À qui s’adresse cette formation exactement ?

BG : Il y a beaucoup de profils différenciés. Déjà pour postuler au DU il faut pouvoir justifier de 200 heures de stage, sinon le dossier est mis de côté lors de la sélection. Donc ils arrivent tous avec un lien avec une structure. Mais sinon, nous avons des profils qui sont complètement éclectiques. Cette année, nous avons par exemple un jeune qui a 19/20 ans et qui est en stage sur la région parisienne. Et il y a un collègue, maître de conférences à Saint-Étienne, qui a une quarantaine d’années et qui voulait avoir le diplôme pour attester de connaissances reconnues dans l’analyse vidéo. Certains font cela à la suite de leurs études et veulent avoir la possibilité de justifier d’un diplôme sans aller jusqu’au niveau master. D’autres ont ces diplômes, voire des diplômes de doctorat et ont besoin de compléter un petit peu leur formation pour justifier de leurs compétences auprès d’un club professionnel.

SB : Nous répondons aussi au monde de l’emploi. C’est-à-dire qu’il y a des disciplines où il va y avoir besoin d’analystes diplômés parce que ça fait partie de la culture fédérale : le rugby, le football, un peu le basket, un jour le handball. À la base, ce n’est pas dans la culture des clubs, mais cela risque de le devenir parce que cela vient aussi de projets fédéraux. Des emplois sont créés et nous accompagnons les étudiants. Certains dans la recherche d’emploi, d’autres dans la validation de leur futur emploi. Pour revenir sur les profils, pas mal de personnes sont issues du monde du football. Mais nous avons envie de les amener dans des milieux qu’ils ne maîtrisent pas. Notre ligne directrice est qu’ils doivent s’adapter à toutes les disciplines.

BG : C’est ce que nous pouvons faire aussi via un diplôme professionnel comme celui-là. Nous sommes vraiment sur des créneaux qui sont restreints dans le temps. Nous leur expliquons qu’ils ne pourront pas tout voir dans le cadre du DU et qu’il va falloir qu’ils aillent explorer. Il faut sortir un peu des carcans et aller voir ce qui ce qui se fait ailleurs, se former et être curieux tout simplement.